"Je me suis réveillée en manquant d'air" : Florence, infectée par le Coronavirus, témoigne
Le coronavirus se répand comme une traînée de poudre à travers le monde et affecte de plus en plus de personnes. Certains des malades décident cependant de témoigner afin que tout le monde prenne conscience de la situation.
C'est le cas de Florence Flaix, une mère de famille de 47 ans qui est confrontée au Covid-19 et qui a décidé de partager son histoire avec les Français, racontant jour après jour l'évolution de sa maladie.
SON TÉMOIGNAGE
À travers son journal, on découvre le portrait d'une femme très active, investie dans son entreprise en Île-de-France et auprès de sa famille. Une femme en forme qui ne tombe presque jamais malade et qui a très rapidement commencé à adopter des mesures pour se protéger avant que la distanciation sociale ne soit entrée en vigueur.
Elle ne serrait plus les mains, ne faisait plus la bise et s'assurait de se couvrir le visage et de rester loin des autres passagers lorsqu'elle était obligée de prendre le métro.
Elle raconte comment elle a fait face à la fermeture des écoles, ses dernières sorties avec sa famille (un restaurant, un cinéma et une promenade en forêt) et ses dernières courses avant l'annonce du confinement.
"On a fait des courses, grosses courses, j’ai vu le début d’une pénurie papiercuesque assez étonnante."
À ce moment-là, Florence ne le sait pas mais elle est déjà en période d'incubation et rapidement les symptômes vont commencer à se manifester.
Au départ il s'agit simplement d'une gorge sèche et d'une mauvaise nuit qu'elle met sur le compte du stress lié à la situation. Mais alors qu'elle vaque à ses nombreuses occupations, jongle entre les conférences pour son travail et les sorties à la pharmacie et au magasin, une fièvre se déclenche, accompagnée très rapidement par une toux sèche, une gorge incroyablement douloureuse et un ventre gargouillant.
Florence Flaix. l Source : Facebook/Florence Flaix
"Je ne prends rien, pour surveiller.Je ne prends pas non plus RDV, parce que non c’est pas ça pas moi pas maintenant pas..."
Après avoir refusé d'envisager qu'elle ait pu être infectée, elle fini par prendre rendez-vous avec son médecin traitant sur les conseils de ses proches et de ses amis. L'entretien se déroule en visionconférence mais le verdict ne se fait pas attendre : Florence est infectée par le coronavirus. Il lui faut un moment pour encaisser la nouvelle mais après avoir accepté la situation elle écoute les recommandations de son médecin qui lui explique que la maladie dure en général 14 jours et que c'est entre le 6ème et le 8ème jour qu'elle peut s'aggraver.
C'est là qu'elle prend la décision de raconter son histoire car les témoignages se font rares et les gens ont du mal à réaliser à quoi ils font face. Elle raconte ainsi l'évolution de la maladie au cours de cette semaine interminable. Le plus compliqué est le fait que les symptômes changent d'un jour à l'autre, disparaissent pour réapparaître quelques heures plus tard.
Les nuits sont terribles. Pendant l'une d'entre elles, elle se réveille totalement essouflée, n'arrivant pas à reprendre son souffle. La crise a fini par passer mais lui laisse un terrible souvenir. Au souffle court s'ajoute de terribles douleurs dans la gorge semblables à des couteaux et aussi mais surtout une toux, une toux terrible et sèche qui ne passe pas.
"Je me suis réveillée en manquant d’air. Je respirais comme si je venais decourir ou de monter 6 étages,et ça a duré."
Malgré les symptômes, elle continue à faire de son mieux pour travailler, son rôle de DRH étant majeur pour son entreprise. Pendant sept jours elle a fait face à des poussées de fièvre, à des symptômes qui variaient en intensité et à des coups durs comme l'hôspitalisation de l'un de ses amis d'enfance.
Mais après sept jours de combat face au virus et une nouvelle visioconférence avec son médecin, elle est soulagée : sa praticienne se montre rassurante et lui dit que le plus gros de la maladie est derrière elle.
"Elle me rassure car elle est persuadée qu’on a fait le plus gros, la bête et moi, on est bientôt à la fin de la période sensible qui peut basculer dans le drame. Je pensais bien que j’allais survivre, mais j’avais quand même toujours un petit doute. Son discours me fait donc assez plaisir."
La huitième nuit marque sa première nuit de sommeil ininterrompu : six heures sans tousser. Une petite victoire qui marque le début du chemin de la guérison bien qu'elle n'ait pas encore recouvré la forme.
Florence Flaix. l Source : Facebook/Florence Flaix
À travers son témoignage que vous pouvez lire ici, Florence nous permet de découvrir le point de vue d'une personne malade avec ce qu'il faut d'humour et d'honnêteté pour ne pas faire paniquer ses lecteurs mais tout de même les mettre en garde. En effet elle ne fait pas partie de la population considérée comme à risque : femme de 47 ans, active, "ni asthmatique ni obèse", elle a pourtant trouvé en ce virus un adversaire terrible.
QUELQUES RÉPONSES
Malgré son emploi du temps chargé et le fait qu'elle soit encore malade bien que sur la voie de la guérison, Florence a accepté de prendre le temps de répondre à quelques-unes de nos questions.
Vous racontez avoir commencé à prendre des mesures bien avant qu'elles ne soient conseillées par le gouvernement, comment avez-vous entendu parler du coronavirus ? Et est-ce que vous pensiez que la maladie prendrait tellement d'ampleur ?
Florence : Mon mari travaille avec la Chine et les médias en parlent depuis pas mal de temps quand même ! En janvier pour le nouvel an chinois nous étions déjà très bien informés puisque déjà des défilés étaient annulés à Paris. Je ne pensais pas, non. On a tous le souvenir du « flop » du H1N1.
Des patrouilles près du Louvres le 17 mars 2020, s'assurant que le confinement est bien respecté. l Source : Getty Images
Quand vous apprenez que vous êtes malade, vous expliquez qu'il vous a fallu un temps pour accepter la situation. Comment vos proches ont-ils réagi à la nouvelle ? Et comment ont-ils fait pour vous soutenir durant ces longs jours de maladie ?
Florence : En fait je ne suis "jamais" malade, à part une maladie auto-immune parfaitement maîtrisée, et qui me donne plutôt une plus forte immunité que la normale. Mon dernier rhume date de 5 ans. Personne autour de moi n'était malade, je faisais super attention et je trouvais ça très injuste. Mon mari a été très inquiet, et pour lui aussi. Mes enfants ont totalement minimisé la chose en disant que je n'avais aucun risque ni l'âge critique et que ce serait donc rien du tout.
Le plus gros de la maladie est désormais derrière vous et vous devriez rapidement retrouver toute votre vitalité (je vous le souhaite en tout cas). Après avoir fait face au virus est-ce que vous le trouvez moins menaçant ? Les descriptions que vous faites de vos nuits notamment font comprendre que même pour une personne qui n'est pas un cas critique, ce fameux covid que vous imaginez poilu et vert peut être particulièrement douloureux.
Florence : Oui j'espère. Je sens que mon souffle est encore très court et que cela ne va pas revenir tout de suite. Et les nuits de 2h vont mettre du temps à me rendre la pleine forme. Mais j'étais vraiment moins fatiguée que la plupart des autres, j'ai travaillé tous les jours parce que c'était vraiment important pour l'entreprise (je suis DRH).
Je ne le trouve pas du tout moins menaçant ! J'ai vraiment eu l'impression d'avoir quelqu'un à l'intérieur de mon corps qui jouait et traquait la moindre faiblesse. Je me sais assez résistante mais j'ai pensé que s'ils l'avaient avec cette force, beaucoup seraient encore plus mal. C'est le côté inattendu qui était le plus effrayant. Pas de courbes de progression classique d'un rhume ou d'une grippe, mais un grand n'importe quoi tous les jours avec des retours en arrière et des attaques en traitre (l'étouffement la nuit, vraiment pas sympa monsieur virus...). Le fait qu'un de mes bons amis soit partis aux urgences ne m'a pas rassurée non plus.
Aujourd'hui j'entends des décès qui se rapprochent dans le deuxième cercle (des amis d'amis), comme cela s'est passé pour les cas de "malades". Et je pense aux hôpitaux qui vont devoir choisir.
Je me suis beaucoup battue avec mes proches ou sur les réseaux pour dire que non, ce n'est pas une grippette.
Le quartier de la Défense à Paris presque vide le 17 mars 2020. l Source : Getty Images
Ce virus vous a-t-il poussé à remettre certaines choses en perspective et à changer certaines de vos priorités ?
Florence : Perspectives et priorités : pour l'instant non. C'est après 6 semaines de confinement que je pourrais peut-être mieux le dire. Je n'ai pas frôlé la mort non plus, donc je ne suis pas transformée intérieurement. Juste très lucide.
Un conseil que vous aimeriez que les gens entendent et suivent ?
Florence : Un conseil ? Ne prenez pas ce virus à la légère. S'il ne vous tue pas, il tuera peut-être un ami, un grand-parent, et de toute façon quelqu'un dont ça n'aurait pas du être l'heure et que d'autres aimaient fort. Ne soyez pas "fier" de l'avoir eu comme un trophée de chasse ou une place de cancre de la classe. Ne le souhaitez à personne.
Merci à Florence Flaix d'avoir pris le temps de répondre à nos questions et de partager son expérience avec les Français. N'hésitez pas à lire son compte-rendu détaillé de son face à face avec le coronavirus ici et à la remercier de son partage sur les réseaux sociaux !