Le déficit des gynécologues en France: quelles implications pour les femmes modernes
En dix ans, le nombre de gynécologues a chuté de 42%. Une situation qui menace la santé des femmes.
En 2017, le Conseil national de l'ordre des médecins a établi que 6 départements ne comptaient absolument aucun gynécologue. Entre 2007 et 2017, leur nombre a chuté de 42%. Un constat alarmant qui menace la santé des femmes, comme le confirment les témoignages de gynécologues et de patientes.
"J'ai reçu ce matin en consultation une jeune fille de 20 ans, sous pilule depuis cinq ans et suivie par son médecin généraliste." , déclare Anne Noblot, gynécologue médicale à Dunkerque.
Un médecin qui remplit une ordonnance | Photo: Pixabay
"Cette jeune fille n'a JAMAIS été examinée (je parle d'examen gynéco bien entendu). Elle est porteuse d'un nodule mammaire de 3 cm de diamètre facilement palpable, et d'un herpès génital qui a été catalogué 'mycose' sans contrôle clinique."
Une patiente déclare quant à elle : "Impossible de trouver une gynéco. J'obtiens toujours la même réponse : 'Nous ne prenons plus de nouvelles patientes'. Résultat : personne n'a suivi ma ménopause et cela fait bientôt cinq ans que je n'ai pas eu de frottis".
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A la différence des gynécologues obstétriciens, qui se chargent des chirurgies et des accouchements, les gynécologues médicaux s'occupent du suivi gynécologique des femmes.
La chute de gynécologues médicaux ne touche pas que la campagne. Par exemple on compte une chute de 43% des gynécologues médicaux à Paris en huit ans.
Cette baisse peut s'expliquer par des raisons financières, comme l'explique Marie Stagliano, coprésidente du CDGM.
"En 1987, le ministère a supprimé la spécialité gynécologie médicale, dans le silence le plus total. La motivation de cette suppression était également liée à l'harmonisation européenne des diplômes, la France étant le seul pays à enseigner la gynécologie médicale."
En 2003, les femmes ont eu gain de cause à force de protester, et la discipline a été réinstaurée. Mais si avant la suppression, les places en internant étaient de 130 par an, entre 2003 et 2011, elles n'étaient plus qu'à une vingtaine.
Un nombre de places insuffisant donc pour compenser les départs à la retraite. Face à cela, les femmes se tournent de plus en plus vers leurs généralistes, qui ne sont pas en capacité d'assurer ce genre de suivi.
"Les progrès de la médecine ont beau être importants, la suppression ou diminution des gynécologues médicaux est un énorme recul, il faut y remédier au plus vite"
"On va se retrouver avec des dépistages tardifs, des frottis anormaux, une augmentation des cancers du col de l'utérus, des problèmes d'infections, des IST difficiles à détecter, des pathologies du sein. Quant à la ménopause, il n'y a que les gynécologues médicaux qui s'en occupent.", déclare Pia De Reilhac, gynécologue.
Ce manque d'effectif pourrait aussi "handicaper les femmes dans leur contraception", et même compliquer l'accès aux informations sur la sexualité et le suivi pour les plus jeunes.